Accueil
J’ai suivi la venue des monstres que l’on nomme les Noyés pour des raisons évidentes. Dégoulinant d’eau en permanence, le teint cadavérique, parfois rongé parfois gonflé par l’eau. Leur grognement suffit aujourd’hui à réveiller la peur la plus poignante jusqu’à que l’on croise leur regard mort et blanc, leur gueule entrouverte et bien sûr… cette odeur… l’odeur immonde du cadavre mêlée à l’eau croupie ou celle d’un marécage pestilentiel. Que ce soit l’allure d’un homme ou même d’un chien un Noyé se reconnait par tous ces critères.
Au royaume de Salmofer, le fléau s’est propagé comme dans le reste du continent j’imagine : une attaque de caravane par-ci, un enfant disparu par-là… Quelques semaines après c’était des hameaux vidés de leurs habitants et bientôt les villes qui voyaient des morts se relever. Malgré les murailles il était difficile de repousser un ennemi déjà mort.
Voilà alors que la nation organisa un exode pour mettre le plus grand nombre à l’abri dans des régions moins accessibles et plus faciles à protéger grâce à des accès restreints. Je me rangeais bien évidemment dans l’un des groupes, et même mon goût de l’exploration et des découvertes avait sa limite face à une telle situation. Le plus grand nombre décidèrent de se diriger vers Chantebrume : une terre abandonnée à l’air sauvage depuis une bonne dizaine d’années suite à de nombreux décès et attaques d’un groupe que les gens d’ici nomment les Ondines. Il se dit que la zone côtière est également refuge de plusieurs contrebandiers mais cela n’allait visiblement pas arrêter notre cortège, prêt à se battre pour ce lopin de terre si cela les tenaient à l’abri des morts. Avant le départ, provisions et armes sont chargés sur des charrettes que les boeufs allaient tracter. Hommes, femmes, enfants et même nourrissons : tout le panel de la population était du voyage et quelques bêtes également, poules, bovins et ovins ; tous allaient suivre la masse. Néanmoins, il n’était pas rare que plusieurs des habitants désireux de tenter leur chance par eux-même ou simplement voulant retrouver des proches restèrent en retrait pour suivre leur propre route.
Le voyage fut long, nous marchions au rythme des charrettes, aidions à passer les obstacles à la force de nos bras et ne faisions que peu de pause. Nous traversâmes une zone rocailleuse, des pentes raides et des broussailles qui avaient repris leur droit sur la route après ces longues années d’abandons.
Aucun mort ne vint perturber le voyage et face à nous se trouvaient enfin les premières étendues de Chantebrume. Sauvage et dangereuse, la région se devrait d’être dompter de nouveau. Il nous fallait à présent regagner la cité, anciennement nommée “Almaroc”, afin d’y rebâtir nos vies.
Je ne saurais vous dire s’il existe d’autre lieux et d’autres groupes comme le notre, ni même l’état du reste du monde : seul le temps saura nous en dire davantage.
La voyageuse
